Le lieu-dit Paradis (Petit Paradis)





La rue Paradis est aussi abordée dans la rubrique consacrée au quartier des Guillemins, au niveau de son réaménagement face à la nouvelle gare Calatrava inaugurée en 2009. Quant à cette page, elle traite des origines du nom « Paradis » et de l'histoire du chenal portuaire qui longeait autrefois la Meuse depuis le lieu-dit Petit Paradis jusqu'à l'évêché.



SÉRIE 1 : la chapelle du Paradis.
 

Jusqu'au début du XIXe siècle, la rue Paradis s'est appelée la rue des Hours, ce dernier mot désignant à l'époque les scieries de bois établies dans les alentours.

 

L'appellation « hours » provient d'un ancien mot wallon désignant l'échafaudage utilisé par les scieurs de long.

     

C'est en 1848 que la rue des Hours devient officiellement la rue Paradis. Il est vrai qu'une chapelle dite du Paradis existe à proximité depuis le milieu du XVIIe siècle, au coin des actuels quai de Rome et rue de Fragnée. L'oratoire tirait lui-même sa dénomination, non d'une origine religieuse, mais d'une agréable maison de campagne existant là précédemment et baptisée le « Paradis terrestre ». Cette luxueuse propriété est déjà citée au XIIIe siècle comme appartenant à Louis Surlet, riche bourgeois et échevin de la Souveraine Justice de Liège.

 
La chapelle du Paradis en 1850, à l'angle du quai de Fragnée (devenu quai de Rome) et de la rue de Fragnée.
 
Le même endroit en 2009 (photo obtenue grâce à Google Maps).

     
Cette vue date de la grande crue de décembre 1880. Le bateau est supposé amarré le long du quai de Fragnée. La chapelle du Paradis est abandonnée et délabrée, fermée au culte depuis la construction en 1874 de l’église Sainte-Marie des Anges de la place des Franchises. Elle sera détruite en 1881.
     



Le site à la fin des années 1950. La résidence Petit Paradis (la flèche) est le premier immeuble en hauteur du quartier ; elle remplace la maison à tourelle depuis 1937

 


La maison garnie d’une tourelle, à l’emplacement de l'ancienne chapelle, fait partie des embellissements apportés au quartier en vue de l’Exposition universelle de 1905. À l’autre coin de la rue de Fragnée, le bâtiment avec loggia date de 1916, même s’il se donne des airs plus anciens.



SÉRIE 2 : l'écluse du Petit Paradis et le chenal portuaire.

Dans la rubrique « Grands boulevards », il a été expliqué que le bassin de Commerce d'Avroy, dans la seconde partie du XIXe siècle, a été comblé pour faire place à un parc public. Mais on lui a substitué, dès 1878, un chenal le long de la Meuse dont on vient de rectifier le cour. Ce chenal réservé à la navigation commerciale, parallèle au fleuve du côté rive gauche, s'étend du lieu-dit Paradis au boulevard Piercot, près de l'évêché.

Cette vue (extraite d'une carte postale affranchie en 1904) nous permet de repérer le lieu-dit Paradis (1), l'écluse dite du Petit Paradis (2), le chenal portuaire (3), le boulevard Frère-Orban (4),
le barrage à aiguilles (5) qui régule le cours de la Meuse, le pont de Commerce (6) qui est devenu le pont Albert 1er.

L'écluse du Petit Paradis à l'aube du XXe siècle, avec le chenal de Commerce longeant le boulevard Frère-Orban, voie bourgeoise inaugurée en 1879 et dédiée à l'homme politique liégeois Walthère Frère (Orban est le nom de son épouse), fondateur du parti libéral.
 
En 2010.

 
La bâtiment flanqué d'une tour crénelée est la maison d'éclusier, qui a l'aspect d'un petit manoir. La passerelle d’accès est un pont tournant qui pivote quand il faut
laisser passer les bateaux.
 
Le pont tournant a ouvert la voie à un remorqueur à vapeur, venu tracter les péniches non motorisées. Un chemin, le long de la berge, permet aussi le halage par des chevaux de trait.
     
 
À gauche, le quai de Fragnée deviendra le quai de Rome en 1923. À l’horizon, se découpent les belles-fleurs des charbonnages
des hauteurs de Saint-Gilles.
 
La même vue au début des années 1960, depuis le parc de la Boverie.


     

Sur la vue aérienne ci-contre, on peut voir ce qu'il est advenu de nos jours de ce chenal pour la navigation commerciale : en aval du pont Albert 1er, un parc et un héliport (croix) ; en amont, un port de plaisance (flèche).

1. La Dérivation
2. Le pont Albert 1er
3. La Meuse
4. Le palais des Congrès
5. Le parc de la Boverie
6. Le quai de Rome
7. Le début de la rue de Fragnée.
8. La rue Paradis et l'immeuble des finances.
9. L'avenue Blonden
10. Le boulevard Frère Orban
P. L'emplacement à l'époque de la maison de l'éclusier du Petit Paradis

 
Photo d'André DRÈZE, 1979.

Revenons-en à la première moitié du XXe siècle :
 
Une péniche s’approche de l’entrée du chenal. À la fin du XIXe et début du XXe siècle, beaucoup de ces embarcations naviguent encore à la voile.
 
Le bateau-mouche, lui, emprunte le cours normal du fleuve ; son embarcadère est situé un peu plus loin sur la jetée, près de l’évêché.

     
En 1930.
 
En 2013, pendant un gigantesque chantier de réaménagement du quai.
     
 
Le chenal de Commerce le long du boulevard Frère-Orban, avec, du côté Meuse, l'embarcadère pour les bateaux-mouches (la flèche).
 
Le trafic des bateaux-mouches à vapeur près de l'embarcadère qui leur est réservé, à proximité de l'évêché.

     
 
Le pont que l'on aperçoit sur ces deux photos est le pont de Commerce, montré de l'amont puis de l'aval. Deuxième du nom (le premier datait de 1866), il a été construit en vue l'Exposition universelle de 1905, pour mener au jardin d'Acclimation (on dit aujourd'hui le parc de la Boverie), où allait se dérouler le prestigieux événement.
     
À propos du pont de Commerce menant à l'Exposition universelle de 1905, voici probablement la foule des visiteurs qui arrivent via le boulevard Frère-Orban et les Terrasses :
André RENSON, Liège - La Meuse en bord de ... Meuse, éd MET 1997 (photo MVW)..

Inondant un tiers de la ville, les crues exceptionnelles de l’hiver 1925-1926 se sont moquées des améliorations apportées au réseau hydrographique à la fin du XIXe siècle. Dès 1928, des fonds sont libérés, avec l’aide d’une Commission nationale, pour entreprendre de nouveaux travaux d’approfondissement, d’élargissement et d’endiguement du fleuve.

Pour stabiliser le cours de la Meuse, un pont-barrage est construit en 1930 au niveau de l’île Monsin, zone qui accueille, dès 1937, le port autonome de Liège. La nouvelle infrastructure est bientôt reliée au port d’Anvers grâce à l’inauguration du canal Albert en 1939, dans le cadre de l’Exposition internationale de l’Eau que la déclaration de guerre a interrompue.

Toutes ces circonstances rendent obsolètes le barrage à aiguilles à proximité du pont de Commerce et le chenal éclusé qui longe le boulevard Frère-Orban depuis 1878.

     
 
Le chenal en activité au début
du XXe siècle.
 
Le comblement du chenal à la fin
des années 1930.
     
 
La résidence Petit Paradis à la fin des années 1930. La roulotte et l’esplanade terreuse évoquent les travaux de remblayage du chenal portuaire.

 
Septembre 1944. Les soldats américains du génie aménagent des ponts provisoires sur la Meuse. Leurs camions-grues sont stationnés sur l’ancien chenal récemment comblé (dans le fond : la résidence Petit Paradis).
     
Fin des années 1930.
 
En 1970 (année de l'inauguration de la Tour Kennedy qu'on aperçoit en cours
d'achèvement dans le lointain).

 

Cette partie de l'ancien chenal de Commerce n’a pas été comblée, en prévision d’y établir un port de plaisance.
 
Le port des yachts en 2007.


     
 
               En 1939.
 
À la fin du XXe siècle.
     
 
En 1962.
 
En 1977.
     
 
L'entrée de l'ancien chenal du côté évêché, au début du XXe siècle.
 
L'entrée du port de plaisance
en 2013.

Le plongeur est une œuvre du sculpteur roumain Idel Ianchelevici (1919-1994), conçue à l'occasion de l'Exposition internationale de l'Eau de 1939, où elle surplombait la piscine du Lido (photo ci-contre) sur le site de Coronmeuse à l'entrée du canal Albert.

C'est une réplique en polyester creux sur armature métallique qui est installée depuis 2000 à l'entrée du port de plaisance.

 

 
Essai de charge en 1959 pendant la construction du pont Albert 1er (en remplacement de pont de Commerce saboté dès le début de la seconde guerre mondiale). L'architecte Georges Dedoyard a également prévu d'aménager, à l'emplacement désigné par la flèche, une esplanade fleurie et une statue équestre du roi chevalier.

La statue d'Albert 1er, réalisée par Charles Deplae.


L'esplanade et la statue équestre (1), entre le pont Albert 1er (2) et l'héliport (3).

 


Photo d'André DRÈZE, 1979.


Dès le début des années 1950, à la demande de l’administration des Postes, la SABENA s'intéresse à l’acheminement du courrier par hélicoptère. À Liège, un héliport est aménagé à cet effet en bordure du boulevard Frère-Orban, sur une partie du terrain récupéré grâce au comblement de l'ancien chenal. En 1958, il servira au transport de passagers en direction du Heysel, à Bruxelles, où se tient l'Exposition universelle.

Un Bell-47 de la SABENA aéropostale. À l'arrière-plan, il s'agit d'un pont provisoire en attente du nouveau pont Albert 1er.

Un Sikorsky S55 au départ de l'héliport liegeois à l'époque de l'Expo 58. Dans le fond, on aperçoit les immeubles des Terrasses.

2013. Le site connaît de grosses perturbations à la suite du chantier gigantesque entrepris sur les quais de la rive gauche. Le restaurant gastronomique installé dans le bâtiment de l'héliport (la piste ne servant plus qu'au transport des VIP) a dû fermer, son patron ouvrant une brasserie provisoire au château de Colonster, au Sart-Tilman.


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